Nous, musicien·ne·s et producteur·trice·s de la musique vivante, appelons l’ensemble des acteur·trice·s de la musique ainsi que la puissance publique à prendre des mesures face à un constat sans équivoque : nous entamons la sixième extinction massive de la vie sur Terre – la première extinction délibérée de l’histoire de l’Humanité.
Car si les désastres passés et en cours sont irréparables, nous voulons prendre aujourd’hui un virage audacieux et vertueux afin de protéger notre écosystème terrestre, préserver la richesse et la beauté du vivant.
L’écologie ne doit plus être considérée comme un label de bien-pensance mais une pratique collective et un engagement politique. Nous devons transformer les usages de nos métiers et cesser de considérer la planète comme une ressource inépuisable. Face à ce constat, chacun doit faire sa part.
Cela implique le renoncement à certaines pratiques au profit d’une vision à plus long terme, cela implique d’affronter les dilemmes relevant de la responsabilité écologique qui se posent dans la production du spectacle vivant.
Car aujourd’hui, les artistes et les producteur·trice·s vivent des injonctions contradictoires, avec d’un côté l’exhortation à multiplier les représentations, notamment à l’international (toujours plus loin, toujours plus visible) et de l’autre l’exhortation des climatologues à limiter les émissions de carbone et réduire la production de déchets.
Les artistes, les technicien·ne·s, les producteur·rice·s partagent un réel dilemme : selon les usages aujourd’hui admis dans une culture mondialisée, gravir les marches du succès implique de s’enfoncer plus avant dans une course souvent énergivore – transports, matériel, consommables – qui participe à détruire notre écosystème. Dans ce contexte, réduire sa mobilité pour diminuer son impact écologique induirait ainsi de s’invisibiliser professionnellement.
Pour de jeunes artistes, cette prise de conscience est d’autant plus amère qu’elle fait
« renoncer » à un modèle global de carrière qui ne semble plus viable ni responsable – mais qui malgré cela continue d’être promu comme la référence dans l’inconscient collectif.
Les producteur·trice·s, quant à eux/elles, subissent une double pression entre la nécessité de
« faire du volume » afin de faire tourner leur structure – multipliant parfois les concerts isolés et événementiel à l’autre bout du monde -, et la pression exercée par les artistes qui voient en eux « l’homme ou la femme providentiel·le » censés les mettre en lumière et développer leur carrière.